Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
caroline Renault centenaire
20 février 2009

la taule

Photo_caroline_Renault_043LES CENT ET UNE AVENTURES DE CAROLINE RENAULT ; AUTO- BIOGRAPHIE

LA TAULE

Je patientais sagement devant la caserne Nansouty à bordeaux un peu sur la droite de l’entrée, devant le petit pavillon qui jouxtait le poste de garde et qui constituait la prison du régiment .Le soir et le Dimanche, j’emmenais Christian et ses copains au centre ville ,assez éloigné de la caserne ; ils allaient au cinéma, ou buvaient un demi dans une brasserie du centre, près de la rue  Sainte Catherine, qui était le lieu de promenade et de drague des jeunes Bordelais ; la drague ,ça marchait pas du tout, car l’uniforme de troufion faisait fuir les donzelles,et mes jeunes rentraient bredouilles à chaque fois ; le prestige de l’uniforme était une expression complètement dépassée. Après avoir fait quelques tours dans la ville, je ramenais  ma cargaison à la caserne et attendais la prochaine sortie. Quand je les promenais dans Bordeaux,beaucoup de gens se retournaient pour me regarder, et je ne savais pas si je devais en être fière ou contrite Une fois, deux taxis, qui me regardaient, se sont rentrés dedans ;juste devant un bel hôtel particulier de la rue Ste Catherine ; d’après les copains de Christian, c’était la demeure du Général commandant la région

Un autre jour, en rentrant à la caserne, sur les pavés très disjoints de la rue Nansouty, je perdis mon pont arrière ; j’avais du déjà perdre les boulons qui maintiennent le pont arrière sur les ressorts, et dans un grand cahot, le pont a glissé vers l’arrière ,et l’arbre de transmission est tombé  par terre ,les dés d’entraînement roulant sur le sol. Je n’avais rien de cassé, mais Christian passa un grand moment à tout remettre en place en faisant un empilage de bidons d’huile d’un coté, le cric de l’autre et lui dessous,me soulevant avec son dos en remmanchant les dés et l’arbre avec ses mains ; Il passa discrètement devant le poste de garde pour que le chef de poste ne voie pas les énormes taches de graisse maculant tout le dos de la tenue N° 1,la tenue de sortie des grandes occasions . Christian accrocha le plus vite possible sa tenue dans la penderie, pensant l’ emmener discrètement au nettoyage à sa prochaine sortie : eh bien non, quand il voulut la prendre quelques jours plus tard, le drap très épais de ces vêtements avait bu toute la graisse noire du pont arrière .

  Une autre fois j’avais emmené  toute une bande  de trouffions copains de Christian pour faire le tour de la ville ; en passant rue Sainte Catherine comme d’habitude, la patrouille militaire en ville nous fit signe de nous arrêter ce que je fis immédiatement, malgré mes freins déficients ; l’adjudant chef de patrouille prétendait que  des militaires en tenue n’avaient pas le droit  de se balader dans une « vielle guimbarde » ; Christian, très poliment ,demanda à l’adjudant de lui citer l’article du règlement qui pouvait interdire à un appelé de se promener dans sa voiture ;  l’adjudant invoqua plein d’arguments que Christian,réfuta très calmement, l’adjudant commençait à s’énerver et un attroupement s’était produit, dans cette rue très passante du centre de Bordeaux ; une dame d’abord tenta poliment d’intervenir en faveur de mes troubadours, en vain ; il commençait à y avoir quelques remarques désobligeantes  dans la foule à l’adresse de l’adjudant chef de patrouille ; pendant ce temps Christian gardait son calme, argumentait très respectueusement auprès du chef de patrouille, mais faisait signe en douce à ses compagnons de s’éclipser discrètement,ce qu’ils n’avaient pas l’air de comprendre ;lui avait déjà compris que la partie était perdue et que la punition éventuelle ne serait pas divisée par le nombre de participants, mais multipliée , selon une logique toute militaire . par contre, parmi les spectateurs ,certains commençaient à insulter carrément  l’adjudant : « tous aussi  cons  dans l’armée, ça ne s’est pas arrangé, ,abruti , débile, connard etc  etc «   tout cela n’arrangeait pas les affaires  des restants :un maréchal des logis appelé bien sûr, et un copain de chambrée ; ils rentrèrent penauds et inquiets à la caserne,sans se faire remarquer  .    La sanction arriva deux jours plus tard : deux jours de salle de police pour le copain de chambrée, ,quinze jours d’arrêts de rigueur pour le Maréchal des logis (sergent ) ,et trois semaines de cellule pour Christian !

motif_taule

Le motif : « Se promène à huit dans une voiture démodée , avec une allure débraillée, se donnant ainsi en spectacle . » Il avait dû passer toute sa nuit à trouver ce motif ; en effet, un militaire n’a pas le droit de se donner en spectacle, surtout si c’est un appelé peu ou non gradé La punition était montée jusqu'au général commandant la région qui l’avait approuvée et aggravée ;se souvenait il de l’accident qui s’était produit un peu à cause de moi entre deux taxis  devant son hôtel particulier ? sans doute était ce sa manière de montrer son sens de l’humour ;  Savez vous ce que c’était la cellule ? un charmant endroit d’un mètre cinquante su trois, équipé d’un bas flanc en bois pour dormir, en pente dans les deux sens (on préfère coucher sur le ciment )avec un petit trou dans un coin pour les besoins ; la lucarne à barreaux est équipée d’un volet -chicane  qui ne permet d’apercevoir qu’un petit bout de ciel ;  quand vous entrez dans ce petit paradis, on vous enlève ceinture , bretelles ,lacets, cravate, tout ce que vous avez dans les poches et on vous rase la tète,ce qui à l’époque ,était la pire des humiliations.

  A l’époque actuelle, personne n’oserait traiter ainsi le pire des criminels ; eux ont droit à des lits, des lavabos de la lecture et même la télévision ;mes petits appelés défendaient seulement leur patrie, de gré ou non .    Pendant ce temps, moi j’attendais sagement et patiemment mon pauvre pilote garée un peu à droite de l’entrée de la caserne,juste derrière le mur de la prison, dont on apercevait les barbelés au faîte du très haut mur de clôture . Je compatissais à ma manière  .   Toujours est il que, à sa première permission, courageux mais pas imbécile, Christian me ramena  au garage de Chatelaillon  .J’y suis restée jusqu’à son retour d’Algérie, ou il fut expédié peu après .

Publicité
Publicité
Commentaires
caroline Renault centenaire
Publicité
Publicité